Kyojiro ne comprenait vraiment pas ce qu’il se passait. Est-ce qu’il avait fait quelque chose de mal ? Non, il le savait. Il avait bien fait quelque chose de mal… A cause de lui, Zelda s’était pris des coups et sa console avait été détruite. Tout ça parce qu’il n’avait pas réussi à se montrer sociable alors qu’il faisait pourtant de gros efforts depuis maintenant deux ans. Mais rien à faire, il n’avait pas pu se comporter avec cette demoiselle comme il le faisait avec Zelda. C’était différent, beaucoup trop différent. Avec la geekette, il se sentait à l’aise, vraiment, il passait des bons moments même s’il ne comprenait pas toujours ce qu’elle lui racontait, mais ça lui plaisait. Cette inconnue… Okay, elle était très mignonne mais… Non, le courant n’était pas passé, la faute sans doute à cette surprise de se retrouver soudainement, et sans possibilité de fuir, en plein rendez-vous amoureux.

Quoi qu’il en soit, après ce moment vraiment très difficile pour le kendoka qui se sentait coupable, sa culpabilité ne fit que croître en voyant que Zelda semblait le fuir. Ils ne se croisaient plus aussi souvent et, d’abord réticent à faire le premier pas, persuadé que, de toute façon, c’était sa faute, Kyojiro avait finalement craqué. L’absence de Zelda dans son quotidien provoquait comme une sensation de vide et il avait de plus en plus de mal à l’accepter. Il avait commencé à poser quelques questions à Link, juste pour s’assurer que la demoiselle allait bien. Il avait aussi essayé de lui envoyer de messages et de l’appeler mais… Non, la demoiselle semblait bien décidée à couper les ponts avec lui. Kyojiro avait vraiment mal au cœur à cette idée, semblant encore plus renfrogné qu’à son habitude à cause de tous ces tourments. Qu’est-ce qu’il pouvait faire pour se racheter ?

Fatigué de se poser autant de questions et de n’avoir finalement aucune réponse, Kyojiro décida qu’il était temps de forcer Zelda à lui dire ce qu’elle avait sur le cœur. Si elle ne voulait plus le voir, le kendoka préférait largement qu’elle le lui dise de but en blanc plutôt que de le laisser tout simplement dans l’incertitude. C’était bien trop difficile… Le lycéen se lança alors dans une filature pour essayer de trouver un moment qui lui permettrait d’être seul avec Zelda pour qu’ils puissent s’expliquer. Et puis… Il devait lui offrir cette console qu’il avait achetée pour elle. Ça lui avait coûté un bras, toutes ses économies pour l’année à venir, mais tant pis. C’était une édition limitée en plus, il n’avait pas fait dans la dentelle !

Quoi qu’il en soit, la filature de Kyojiro le mena jusqu’au secrétariat. Bon, parfait. Il n’avait plus qu’à attendre qu’elle sorte. Le kendoka resta planté dans le couloir, bien droit, l’air beaucoup trop sérieux, à attendre que la jeune femme ne ressorte. Croiser son regard fit un peu tiquer Kyojiro qui essaya de rester le plus sérieux et imperturbable possible. Il s’inclina tout de même poliment quand Zelda le salua, celle-ci baissant aussitôt les yeux avant d’ouvrir la porte derrière elle pour inviter son camarade à aller au secrétariat. Mais Kyojiro n’était là que pour une chose : parler avec Zelda. Il se rapprocha soudainement d’elle, ne se trouvant qu’à quelques centimètres alors qu’il tendait le bras pour refermer la porte, ne détachant pas son regard de sa camarade.

« Yoshida-san… C’est toi que je voulais voir, il… il faut qu’on parle. »

Ah, voilà. Il avait suffi qu’il ouvre la bouche pour perdre toute son assurance. Mince, il s’était répété son discours un milliard de fois dans sa tête pourant, mais il avait l’impression qu’il ne pouvait juste plus prononcer un seul mot maintenant qu’il se trouvait face à elle. Il était tellement content de la revoir qu’il avait envie de lui faire un gros câlin ! Mais non, à la place, Kyojiro se contenta de lui attraper délicatement le poignet après avoir fait un pas en arrière.

« Est-ce qu’on peut aller un peu plus loin ? Je… C’est très important. »

Et il illustra ses dires en resserrant un peu ses doigts autour de son poignet. Kyojiro ne voulait pas la forcer, mais il devait VRAIMENT lui parler ! Sentant qu’elle ne lui opposait aucune résistance, il l’emmena un peu plus loin avant de la lâcher, faisant basculer son sac de cours devant son torse pour l’ouvrir et lui tendre un petit paquet, celui qui contenait la console.

« J… Joyeux Noël e-en… retard. »

Okay, en fait, c’était carrément gênant ! C’était les amoureux qui s’offraient des cadeaux pour Noël en plus ! Les joues rouges et le regard fuyant, Kyojiro eut bien du mal à reprendre contenance, inspirant finalement profondément pour se redonner du courage.

« Je… Je sais que tu m’en veux m-mais… Je… Je préfèrerais que tu me le dises si… si tu veux que… enfin… qu’on se voit plus jamais. »

Kyojiro la fixait, les sourcils froncés, mais on pouvait clairement lire toute son appréhension. Si elle lui disait qu’elle ne voulait plus jamais le revoir, il sentait que son cœur allait lui faire atrocement mal…

Kyojiro dut avouer qu’il avait été un peu vexé de voir Zelda fermer les yeux aussi fort alors qu’il s’était approché et avait tendu le bras vers elle pour refermer la porte du secrétariat. Est-ce qu’elle avait vraiment pensé qu’il pourrait lever la main sur elle ? Le kendoka fronça un peu plus les sourcils. Ça ne faisait pas si longtemps que ça en vrai qu’ils avaient arrêté de passer du temps ensemble mais… Ses sentiments pour la demoiselle n’avaient pas changé malgré cette distance qu’elle avait installée de force entre eux. Le lycéen ne la voyait plus autant, mais il l’appréciait toujours à même mesure qu’avant ces événements… Si elle avait eu peur, est-ce que c’était parce qu’elle ne l’appréciait tout simplement plus ? Ce qui expliquerait aussi pourquoi elle l’ignorait de cette façon, aussi bien ses messages et appels que physiquement. Non, décidément, Kyojiro ne pouvait pas laisser cette situation dans cet état. Tout allait empirer sinon, et il devait en avoir le cœur net : si Zelda lui en voulait et ne souhaitait plus le voir, il devait l’entendre de sa bouche. Résultat, le kendoka ne lui laissa pas vraiment le choix et lui saisit délicatement, mais fermement, le poignet pour l’emmener un peu plus loin.

Enfin éloignés du secrétariat, Kyojiro ramena son sac de cours devant lui pour l’ouvrir et en sortir un paquet qu’il tendit à Zelda. Même si elle ne voulait plus le voir ni lui parler… Il ne pouvait pas garder davantage ce cadeau qu’il avait voulu lui offrir depuis plus d’un mois à présent. Il n’en ferait rien de toute façon… Le lycéen lâcha un faible soupir de soulagement en voyant que la demoiselle prenait le cadeau et s’inclinait pour le remercier. Ouf ! Il aurait eu l’air fin si jamais elle n’en avait pas voulu ! Le kendoka n’avait plus qu’à espérer que ce cadeau allait lui plaire quand elle allait enfin pouvoir l’ouvrir !

Mais le cadeau n’était plus le sujet principal. Maintenant qu’il avait été remis à Zelda, il fallait qu’ils aient cette conversation désagréable. Kyojiro était préparé au pire, mais il voulait savoir ce qu’il avait fait de travers. Lui qui était persuadé d’être la cause de tout ça, il fut plus que surpris quand Zelda lui lança qu’elle ne lui en voulait pas, se lançant dans des explications qui firent rougir plus que de raison le pauvre kendoka qui n’osa plus se perdre dans le regard brillant de sa camarade, trouvant un soudain intérêt à l’un des carreaux du carrelage à côté de son pied gauche. « L’une des personnes qui comptent le plus pour elle » ? Pour de vrai ? Kyojiro était super gêné, mais il ne pouvait pas non plus s’empêcher de sourire comme un imbécile heureux. Elle ne lui en voulait pas et elle l’appréciait toujours… Il était tellement soulagé !

Mais la suite du discours de Zelda lui fit froncer les sourcils et relever son visage pour fixer la demoiselle. Il ouvrit la bouche pour lui répondre et entendit son téléphone sonner. Soupirant doucement en fermant les yeux, il allait se résigner et la laisser décrocher mais… Non ! Il rouvrit les yeux et la fixa très sérieusement.

« Ne décroche pas s’il-te-plaît Yoshida-san. On… On doit finir cette discussion parce que… moi… moi aussi j’ai des choses à te dire. »

Okay, c’était pas du tout flippant de balancer un truc comme ça ! Il inspira profondément et décida de se lancer. Il avait répété cette scène un millier de fois dans sa tête, mais il avait l’impression d’avoir hyper chaud et que son cœur allait exploser tellement il battait vite.

« Je… Moi aussi j’ai pensé à toi tous les jours, je… Tu m’as vraiment manqué, ce n’était pas pareil sans… toi. Je t’apprécie vraiment beaucoup et j’ai été triste que tu m’évites comme ça, tu… tu aurais dû m’en parler… »

Oui, Kyojiro lui en voulait un peu d’avoir laissé la situation s’envenimer parce qu’elle n’avait pas eu le courage de lui dire ce qu’elle avait sur le cœur. Si elle n’avait pas voulu le lui dire en face, un message aurait suffi ! Mais non, elle avait préféré faire la morte… Le regard du kendoka se dirigea vers les mains de Zelda qui serraient toujours le paquet qu’il venait de lui offrir.

« Tu ne dois pas avoir peur pour moi tu sais, je… Je sais me défendre et je préfère qu’on… affronte les choses ensemble plutôt que… chacun de son côté. Hum… C’est… C’est comme ça que font les amis non ? »

Kyojiro sentit ses joues devenir encore plus rouges alors qu’il détournait le regard et se frottait la nuque nerveusement. « Amis » hein… Est-ce que les amis ne se donnaient pas des accolades pour se remonter le moral ? Le kendoka fronça les sourcils et hésita un peu avant d’ouvrir ses bras pour les passer autour de Zelda et la serrer tendrement contre lui. Est-ce qu’elle allait sentir à quel point son cœur battait ? Ce serait gênant si c’était le cas…

« Ne t’éloigne plus de moi sans rien dire Yoshida-san, s’il-te-plaît… »

Il avait été tellement malheureux de ne plus passer du temps avec elle… Kyojiro voulait qu’elle comprenne qu’elle faisait irrémédiablement partie de sa vie, de son quotidien.

Kyojiro avait vraiment eu peur que Zelda se défile une nouvelle fois en prenant son téléphone comme excuse. Mais il fut soulagé de voir qu’elle avait accepté de l’écouter et de laisser cet appel de côté pour le moment. Ils avaient des choses à se dire et ça ne pouvait juste plus attendre. Ça avait bien trop duré ! Le kendoka inspira profondément et se lança, dévoilant tout ce qu’il avait sur le cœur à sa camarade. Ça avait été dur pour lui et il tenait vraiment sincèrement à elle alors… Il ne voulait plus qu’elle l’évite, pas sans rien lui expliquer avant. Zelda restait silencieuse, baissant la tête, pendant que Kyojiro gardait toujours son regard rivé sur elle. Hésitant un peu à la fin de ses tirades, le lycéen se lança et fit un pas en avant, qui réduisit drastiquement la distance entre leurs deux corps, passant finalement ses bras autour d’elle pour la serrer tendrement contre lui. Elle lui avait tellement manqué… Et puis, ce genre d’accolades, c’était bien ce que faisaient les amis pour se remonter le moral et se réconcilier non ? Kyojiro voulait lui prouver par tous les moyens à sa disposition qu’elle était importante pour lui, mais il ne s’était pas attendu à se retrouver dans cette situation, il devait bien l’avouer.

À ce contact, Zelda avait finalement craqué, enlaçant le kendoka à son tour avant de se mettre à pleurer contre son torse. Kyojiro sentit ses yeux s’écarquiller alors que ses joues étaient toujours en feu et que son cœur était vraiment prêt à sortir de son torse. Non ! Il venait de la faire pleurer ! C’était pas du tout ça qu’il avait prévu ! Il avait voulu la voir sourire, l’entendre à nouveau rire… Mais surtout pas la faire pleurer ! Qu’est-ce qu’il avait encore fait de travers ? Décidément, Kyojiro était le pire ami du monde, c’était certain ! Mais alors qu’il s’attendait à des reproches de la part de Zelda, celle-ci n’en fit rien, se contentant de s’excuser à nouveau d’avoir aussi mal agi. Le kendoka fronça les sourcils, ne sachant pas trop quoi faire de plus, se mettant finalement à tapoter doucement le dos de la jeune femme. Oui, c’était un gros boulet ! Il aurait pu lui caresser tendrement les cheveux et la bercer pour essayer de la calmer, mais il n’était pas doué avec les interactions sociales alors… On ne pouvait pas vraiment lui en vouloir non ?

Une petite moue tordit ses lèvres alors qu’il se faisait violence pour ne pas détourner ses yeux de ceux de Zelda qui le fixaient. Et finalement, un soupir de soulagement franchit les lèvres de Kyojiro alors qu’il posait son regard sur le sourire de sa camarade. Ah ! Voilà ! C’était bien mieux ! La gêne du kendoka s’envola presque aussitôt, un petit sourire étirant lui aussi ses lèvres alors que Zelda rangeait son cadeau dans son sac. Il fut toutefois surpris de la voir lui tendre son petit doigt en lui promettant de ne plus le fuir ou de lui cacher des choses, mais aussi et surtout, de rester avec lui, qu’importe ce que les autres pourraient penser. Inutile de dire que ces mots réchauffèrent aussitôt le cœur de Kyojiro et tout le reste de son corps, en témoignaient ses joues encore rouges alors qu’il avançait un peu timidement son petit doigt vers le sien pour l’attraper.

« M-Moi… Kyojiro Sakurai, je… Je promets aussi de rester auprès de toi, quoi qu’il arrive et… Je promets aussi de te protéger pour que… plus personne ne s’en prenne à toi. »

Il secoua doucement leurs mains pour sceller définitivement ce pacte avant de se sentir soudainement mal. C’était quoi ce délire ? N’importe quelle oreille qui traînait dans le couloir aurait clairement pu comprendre qu’il s’agissait d’une déclaration d’amour ! Gardant son petit doigt lié à celui de Zelda, Kyojiro détourna le regard, plaquant sa main de libre sur son visage pour essayer de cacher sa gêne (en vain, puisque même ses oreilles étaient devenues rouges). Bon… Et maintenant ? Tout était arrangé non ?

« Je… Je suis vraiment content que… tout se soit arrangé entre nous Yoshida-san. E-Est-ce que… Tu as quelque chose de prévu après les cours et les clubs ? Je… Je me disais qu’on… on pourrait peut-être aller hum… chasser des Pokémons ensemble ? »

Okay, la vieille excuse pour pouvoir passer encore un peu plus de temps avec elle ! C’était un peu pitoyable, mais Kyojiro était prêt à mettre sa main au feu que Zelda accepterait si elle n’avait pas d’autres choses prévues. Et d’ailleurs, le lycéen remarqua que leurs petits doigts étaient toujours accrochés, le faisant avoir un petit hoquet de surprise quand ses yeux se posèrent sur leurs mains. Il s’empressa de rompre le contact, qui devenait de plus en plus gênant au fil des secondes, mais le faisant quand même en douceur pour ne pas laisser croire à Zelda qu’il ne voulait plus qu’ils soient proches. Il ne voulait plus qu’elle interprète mal les choses et pense qu’il valait mieux qu’ils s’éloignent l’un de l’autre. Elle avait promis, elle devait rester avec lui maintenant !

« Ah euh… P-Pour le cadeau… C’est… C’est un peu fragile alors… »

Kyojiro se frotta nerveusement la nuque, préférant se taire dès maintenant avant de finir par trop parler et se griller quant à la nature de ce fameux cadeau. Quoi qu’il en soit, maintenant que les choses étaient arrangées, c’était un peu étrange de rester plantés en plein milieu de ce couloir non ?

« On… On y va ? »

Kyojiro attendit la réponse de Zelda, avant de quitter ce couloir en sa compagnie, dans un silence un peu gêné. Ils avaient tant de chose à se dire et de temps à rattraper...